En vingt ans d’amitié, mes amies et moi, on a traversé des ruptures, on a changé de carrière, on a eu des enfants, on a acheté et revendu des maisons, on a accepté que la vie n’était que changement, mais on a refusé une affaire: renoncer à notre voyage de pêche annuel. Une semaine sacrée. Un rituel bien ancré.
Chaque année, c’est la même histoire: une semaine avant le départ, on court, on s’affole à préparer méticuleusement les vacances de quatre mamans dans une contrée boisée, loin des horaires de premiers ministres que sont ceux des enfants inscrits dans les camps de jour. Le jour J, on s’entasse dans un véhicule débordant de cannes à pêche et de sacs de chips et on roule vers la pourvoirie.
On réserve toujours le même chalet, un lieu isolé qui nous permet de rire fort et de se coucher tard sans déranger personne. On remplit les commodes de nos pyjamas, on accroche nos salopettes et nos bottes de pêche à l’entrée, et on s’affaire à la préparation d’un festin dans la cuisine. Après le premier souper, on sort faire un feu à l’extérieur, et nos gestes s’enchaînent comme une chorégraphie bien assimilée: peu de choses sont plus réconfortantes que ces moments-là, qu’on a répété 100 fois à travers les années. On appelle cette première soirée « la veillée des menteuses » ! Pendant des heures, on s’obstinera sur les prises de l’année précédente: « Mon brochet faisait 22 livres ! » « Ben voyons donc, tu dis n’importe quoi! » « Je te dis, long de même ! De l’épaule au genou ! » Au fond de nous, on se fout de qui a raison, faire rire les autres compte plus que tout le reste.
Au petit matin, l’odeur des toasts et du café préparée par la première levée nous indique qu’il est l’heure de se préparer à sortir sur l’eau. Deux par deux, on fait démarrer les moteurs de nos embarcations. Si les cris et les rires fusaient la veille, le silence est désormais glorieux, apprécié. Il est roi à la pêche, et rare à la maison ! On fait le décompte de cette première sortie fructueuse et on en conclut qu’on en aura assez pour le souper, l’heure est donc à la baignade et au sauna !
Vers 17h, un membre du personnel de la pourvoirie est venu nous rendre visite pour nous aider à arranger nos poissons (un p’tit luxe qui facilite la préparation des repas) et nous proposer d’en fumer une partie afin qu’on puisse repartir avec des cadeaux à partager avec nos familles.
Du poisson frais et des vieilles amitiés, que demander de plus. Pour dire vrai, notre première journée de pêche est parfois la seule de notre séjour… On consacre les jours suivants à se balader à vélo, à se faire masser et à se prélasser au soleil. Ça reste entre nous!
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